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Les Seules / Claire Genoux
Livre
Edité par Unes. Nice - 2021
Des poèmes évoquant des femmes marquées par le poids de la solitude, des corps meurtris et des âmes esseulées. ©Electre 2021
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À corps perdus
Les seules sont des corps, contraints, confinés, violentés. Ceux de femmes qui ont perdu leur mère. Ceux de femmes dans un paysage froid, enneigé et brumeux, concentrationnaire. Les univers se superposent, s’entremêlent, le fils narratif est sinueux, l’écriture heurtée, déstructurée, comme ces corps dont il est question tout au long de ce recueil de poèmes. La disparition de la mère était déjà le sujet du précédent recueil de Claire Genoux, Orpheline. "J’écris pour que tu sois moins morte. Je me fais redire dans la tête lentement ton histoire". Les seules poursuivent leur deuil, celui de la mère, de l’enfance. "On est seules / avec le corps de / Mère / longtemps seules / et les pieds froids / (c’est le jour des / marais) /- ils ne savent pas / qu’on l’a vue / qu’elle nous a / regardée". Et c’est le corps des vivants qui en est meurtri. "Vous qui savez /ce qui dans les corps se / raye / vient buter / quand on enlève / une mère / avec elle des dimensions/d’enfances/ce qui est ravalé / dans les longs / caissons de Nuit quand / on nous plante des chemins / faux". De la tombe de la mère, les seules se retrouvent dans un lieu de maltraitance qui fait référence aux camps de concentration. Les corps souffrent des violences infligées par des hommes toujours nommés « ils ». "Ils nous brisent / comme ça / les cils nous lancent / à la tête des objets /coupants / on dirait que des soleils ont été / arrachés / nous culbutons". Dans la deuxième partie du recueil, le corps est moins un objet de souffrance que de jouissance. Les hommes reviennent au singulier. Les poèmes prennent une dimension érotique, les images y sont parfois très crues. "Il l’aimera / sans l’enfant il dit / des jours et / des jours dans / toutes les positions / giclera en elle des / trucs / des poudres des jus / secs". Claire Genoux le sait : la poésie dit l’indicible.
Oliva - Le 27 avril 2021 à 08:57